vendredi 8 mai 2009

Les néandertaliennes enfantaient aussi dans la douleur

Source : Le Monde

Un seul bassin de néandertalienne, et encore incomplet. C'est bien peu pour se faire une idée des conditions d'accouchement de cette cousine, disparue de la surface de la Terre il y a environ trente mille ans. Mais ce peut être suffisant si on utilise des outils de reconstruction en 3D, et que l'on se donne des points de comparaison anatomiques précis.
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C'est la démonstration qu'entendent apporter Jean-Jacques Hublin (Institut Max-Planck de Leipzig) et Timothy Weaver (université de Californie, Davis), dans un article publié le 20 avril dans la revue PNAS. Leur conclusion ? La mise au monde des petits néandertaliens devait être aussi douloureuse que pour les femmes modernes. Mais le bébé n'avait pas à se contorsionner, comme il le fait aujourd'hui, pour se frayer un passage. Chez la femme moderne, la forme du bassin contraint en effet le bébé à s'engager la tête tournée vers le côté, avant d'effectuer un quart de tour pour négocier la sortie. Chez Neandertal, la forme du bassin semble plus primitive, plus proche de celle des grands singes, et ne nécessite pas cette série de rotations du crâne puis du corps du futur nouveau-né.

Cette conclusion s'appuie sur une reconstitution virtuelle du pelvis d'une néandertalienne, Tabun, vieille d'au moins soixante mille ans et mise au jour vers 1930 en Palestine. Les ossements ont été scannés, dupliqués en miroir. Mais comme il manquait le sacrum (la partie postérieure), celle-ci a été modélisée à partir de statistiques tirées d'un échantillon de femmes modernes, et d'une comparaison avec un homme néandertalien. "Les deux méthodes aboutissent à la même reconstitution", indique Jean-Jacques Hublin. Mais ce résultat ne convainc pas Marcia Ponce de León (université de Zurich), qui, il y a quelques mois, avait proposé une reconstitution conjointe de la femme de Tabun et d'un nouveau-né néandertalien : "C'est comme vouloir déterminer la forme d'une pomme à partir de son trognon en s'appuyant sur une comparaison avec des poires", résume-t-elle. Ces critiques n'effraient pas Jean-Jacques Hublin, qui a pris une initiative, notable dans une discipline peu partageuse de ses données : le pelvis virtuel de la néandertalienne va être mis en ligne afin que la communauté scientifique puisse juger "sur pièce".

Hervé Morin

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